1. Les vols Europe—Japon reroutés
Cette carte présente une sélection de routes de divers aéroports européens à destination du Japon. Suite à l’interdiction de survol du gigantesque territoire russe, la plupart des compagnies ont décidé de contourner par le sud. Notre carte, établie à partir des données de FlightRadar24, montre deux trajectoires de vol.
En bleu, le vol JL44 de Japan Airlines contourne par le Nord-Ouest, au-dessus de l’Islande, du Groenland, puis du nord du Canada pour atteindre le Japon en longeant l’archipel des Kouriles. Ce nouveau plan de vol ajoute 3 heures et demi de vol, pour une consommation supplémentaire estimée à 26 tonnes de kérosène.
En jaune, le vol NH204 de All Nippon Airways contourne par le Sud : Turquie, Kazakhstan, longeant la frontière Chine/Mongolie, pour 1h40 de temps supplémentaire et 9 tonnes de kérosène.
Données, méthodologie et détails : How flights between Europe and Eastern Asia got disrupted. Note : cette carte a été reprise dans le bulletin hebdomadaire d’EUROCONTROL du 17 mars (PDF).
2. L’exclave de Kaliningrad sur un fil
Interdite de passage par la Pologne et la Lituanie, l’exclave russe de Kaliningrad n’est plus connectée à l’espace aérien russe que par la fine bande de zone internationale qui serpente en mer Baltique, les avions opérés par des compagnies russes n’ayant plus d’autre choix que de se maintenir à au moins douze milles nautiques à la fois de la côte de Finlande et de celle de l’Estonie. Les lignes qui reliaient Kaliningrad à Saint-Petersbourg, Moscou ou Minsk ne peuvent donc circuler que dans ce mince couloir. Les services de contrôle aérien, qui permettent de garantir la sécurité des vols, sont assurés comme auparavant par les autorités responsables des régions d’information de vol (FIR) correspondantes.
Données, méthodologie et détails : Flying to Kaliningrad during the Russian flight ban.
3. Le système GPS attaqué
Début mars, de nombreux avions dans les pays baltes et en Finlande ont subi des problèmes de brouillage GPS (lire, par exemple, cet article de RFI). Les aéronefs utilisent les satellites du système de positionnement global (GPS) — en plus de systèmes inertiels embarqués — à la fois pour se localiser et à des fins de navigation. La géolocalisation est basée sur des signaux électromagnétiques reçus d’au moins 4 satellites GPS sur des fréquences spécifiques. Mais il est possible à partir du sol d’émettre du bruit (ou de fausses informations) sur ces mêmes fréquences, afin de provoquer un brouillage des signaux des systèmes GPS, par exemple pour éviter le pistage d’un véhicule, ou dans le cadre d’une stratégie de guerre électronique.
Les cartes suivantes montrent une situation normale, au mois de février, puis une situation d’importantes perturbations du GPS autour de Kaliningrad, le 5 mars 2022. Les cellules plus sombres signifient que de nombreux avions ont été touchés par le brouillage GPS. (Les cellules plus petites signifient que peu d’avions ont été signalés dans cette zone.)
Sur le plan technique, la mesure HPL est l’incertitude de la mesure de la position de l’avion, évaluée en mètres ; la densité de rouge correspond donc au pourcentage des avions qui ont constaté un décalage de plus de 200m dans la période de temps et dans la cellule hexagonale concernée (ces cellules sont uniquement là pour nos calculs, elles ne correspondent à rien de réglementaire).
Les incertitudes GPS peuvent s’expliquer par des interférences accidentelles (la foudre qui tombe sur un émetteur radio, par exemple), ou par des brouilleurs de fréquence.
Il faut souligner que ce brouillage n’a pas à priori d’incidence grave sur la sécurité aérienne, les GPS utilisés à bord des avions venant en complément des radars qui, au sol, permettent le contrôle aérien. Mais ces petits dérèglements « cyber » concourent tout de même à créer de l’instabilité, de l’incertitude et de la tension.
Données, méthodologie et détails : GPS jamming around Kaliningrad.
↬ Enrico Spinielli, Xavier Olive et Philippe Rivière