Erosion côtière et accrétion
Au Danemark, on n’est jamais à plus de 52 km de l’océan (selon Wikipédia). Le pays se compose d’une péninsule et d’une multitude d’îles ; le littoral, très étendu, évolue en permanence sous l’effet de l’érosion et de l’accrétion côtières. La page Wikipedia indique que « la taille de la zone terrestre ne peut pas être indiquée avec précision car l’océan affecte en permanence la zone littorale par l’érosion ou les apports de matériaux ». [1]
Ces évolutions sont relativement lentes, très peu visibles - de sorte qu’on les oublie facilement -, et donnent l’illusion d’un paysage statique. Mais pour les résidentes, la nature dynamique de la zone côtière est à l’origine de véritables problèmes : par exemple, que faire quand votre maison s’enfonce dans l’océan ?
L’imagerie aérienne au service de la connaissance
Pour observer et comprendre ces changements, une méthode consiste à les suivre à l’aide d’images aériennes en haute résolution. Examinons ce quartier de Lønstrup, une ville située sur la côte ouest du Danemark :
Le changement est très net, et trois maisons ont tout simplement disparu. Mentionnons ici qu’elles ont été démontées avant qu’elles ne soient avalées par l’océan. Quoi qu’il en soit, en 2022, elles ont belle et bien disparu. Si l’examen des images donne une bonne vue d’ensemble, on peut aussi s’intéresser aux mesures réelles effectuées à des endroits spécifiques. Pour ce faire, il est possible d’utiliser un système d’information géographique (SIG), par exemple QGIS. Les images sont géoréférencées, ce qui permet de trouver les coordonnées GPS de chaque partie de l’image et par conséquent de calculer directement les distances réelles dans l’image.
La superposition des deux images (1999 et 2022) rend la lecture un peu difficile. Pour vous aider, nous avons placé deux repères : le point rouge de gauche représente le bord tel qu’il était en 1999, et le point rouge de droite, le bord tel qu’il était en 2022.
La distance entre les deux points donne une mesure de l’érosion côtière au cours de la période considérée (23 ans) pour cet endroit spécifique : 65,2 mètres, soit une progression d’environ 2,8 m/an.
L’impact humain
L’être humain a un impact majeur sur l’environnement, comme nous le rappellent les débats sur l’origine anthropique du changement climatique et de ses conséquences - principalement le réchauffement de la planète et l’élévation des nivaux marins. Pour faire face à la dynamique de l’érosion côtière - qui semble s’accentuer -, les sociétés humaines imaginent de mettre en place des systèmes de protection, comme celui récemment installé à Hesseløje, sur l’île de Funen (voir cet article publié par dr.dk). Voyons ce que cela donne vu d’en haut.
La protection côtière a été installée sans autorisation de 2001 à 2018, puis approuvée en 2022, avant d’être à nouveau révoquée en 2023. Le débat porte désormais sur le meilleur plan d’action à mener pour les prochaines étapes, et le consensus entre les habitantes et les responsables politiques est difficile à trouver.
Laisser la nature suivre son cours ?
Il est difficile de déterminer dans quelle mesure nous devrions essayer de contrôler la nature, et il est très certainement difficile pour les communautés de se mettre d’accord sur cette question. L’objectif de ce billet n’est pas de répondre à la question de savoir s’il faut mettre plus ou moins d’énergie dans la protection du littoral. Il s’agit plutôt de montrer comment la technologie peut être utilisée pour surveiller nos côtes en les observant d’en haut, en espérant que ça contribue utilement au débat sur le niveau d’intervention que nous jugeons nécessaire. Et si rien d’autre n’est fait, ce sera au moins un aperçu fascinant de la façon dont un pays peut « se transformer » et « se déplacer », au point qu’il est impossible d’avoir une estimation précise de sa superficie.
Nous vous invitons à télécharger vos propres images afin d’étudier la zone qui vous intéresse. Rendez-vous sur le site https://download.atla.ai/ et essayez, et n’hésitez pas à nous contacter à l’adresse contact@atla.ai si vous souhaitez en savoir plus.
Le géographe Sylvain Genevois qui anime l’excellent site Cartonumérique nous signale que, depuis le 1er août 2023, de nombreuses communes françaises ont choisi de rejoindre la liste des villes soumises à l’érosion côtière (voir le décret n°2023-698 établissant la liste des communes dont l’action en matière d’urbanisme et la politique d’aménagement doivent être adaptées aux phénomènes hydrosédimentaires entraînant l’érosion du littoral).
Carte des communes françaises touchées par l’érosion sur le site de France Inter.
Un article paru dans « Les Échos » La France face à l’inexorable érosion de son littoral, 15 août 2023 (sous paywall).