En Suisse, pieds nus contre rangers

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7 septembre 2015

 

Septembre 2015 : au cœur de ce que l’Europe appelle sa « plus grande crise migratoire depuis la fin de la seconde guerre mondiale », les consciences se réveillent-elles enfin ? Après des années de monopolisation du débat public par les discours haineux de l’extrême droite, citoyens et migrants s’organisent pour exprimer leur indignation face au sort des réfugiés. Le point en Suisse, où l’image des pieds nus s’oppose à celle des rangers.

par Cristina Del Biaggio

Géographe, maître-assistante au département de géosciences de l’université de Fribourg et chargée de projet pour l’association Vivre Ensemble à Genève

En 2015, une foule silencieuse transperce la forteresse Europe

Dans toute l’Europe, les initiatives solidaires pour soutenir migrants et réfugiés se multiplient. Des milliers de personnes se proposent pour accueillir les réfugiés chez eux. En Islande, 11 000 personnes ont déclaré vouloir héberger des réfugiés ; en Hongrie, Ferenc Gyurcsany, ancien premier ministre, a recueilli chez lui une famille syrienne de dix personnes. À Vienne, des dizaines de milliers de personnes ont accueilli les réfugiés syriens (en provenance de Hongrie) en clamant « Réfugiés, soyez les bienvenus ! », munis de chariots remplis de vivres et d’habits :

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Accueil des réfugiés syriens à Vienne.
Vu sur Twitter.

C’est souvent pieds nus que les réfugiés débarquent en Europe.

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Un groupe de réfugiés vient de débarquer du navire « Etna » le 19 juillet 2014 dans le port de Salerne (Italie).
Photo : Cesare Abbate, Ansa

La photographie de ces ombres, des jambes de migrants, par Cesare Abbate, que j’ai découverte il y a quelques jours seulement, m’a replongée dans le souvenir des affiches effrayantes que l’on pouvait trouver sur les panneaux publicitaires en Suisse en 2011. Une sorte de flash-back, en somme, et un parallèle : Les pieds nus des réfugiés d’un côté, les « rangers » de l’UDC de l’autre.

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Affiche de l’UDC pour la récolte de signatures en faveur de l’initiative « Stopper l’immigration massive ! » en 2011.

Aujourd’hui, à ces pieds ayant parcouru des centaines de kilomètres, se joignent les pas de citoyennes solidaires, organisant des marches de soutien. La prochaine aura lieu à Venise le 11 septembre, à initiative de quelques cinéastes invités à la prestigieuse biennale dédiée au cinéma.

La marche des femmes et des hommes aux pieds nus

Le moment est arrivé de décider de quel côté on est. Les solutions simples n’existent pas et tout, dans ce monde, est toujours compliqué.

Mais pour affronter les changements de l’histoire, il est nécessaire de prendre position, de choisir ses priorités pour pouvoir faire des choix.

Nous, nous sommes du côté des êtres humains aux pieds nus. De ceux qui doivent se mettre en danger pour pouvoir survivre. Il est difficile de le comprendre pour quelqu’un qui ne l’a jamais vécu dans sa chair.

Mais voilà, c’est exactement ce qu’exige « la migration absolue » : se déshabiller entièrement de sa propre identité, dans l’espoir d’en trouver une autre. Tout abandonner, mettre son propre corps et celui de ses enfants dans un bateau, dans un camion ou dans un tunnel, et espérer arriver entier de l’autre côté, dans un inconnu qui te rejette, mais dont on a absolument besoin.

Ce sont eux, les hommes aux pieds nus du XXIe siècle, et nous, nous sommes avec eux. Il est inhumain de les ignorer.

La marche des « êtres humains aux pieds nus » démarre pour un long voyage vers la reconnaissance des droits civiques, et pour implorer toutes les femmes et tous les hommes du monde globalisé de ne pas rejeter ceux qui ont tout perdu en fuyant les injustices, fussent-elle militaires, religieuses ou économiques. Leur accorder l’asile signifie répudier la guerre et construire la paix. Les accueillir et leur offrir un refuge signifie se battre pour le droit, la liberté et la justice, refuser les inégalités économiques, et promouvoir une meilleure redistribution des richesses.

Vendredi 11 septembre 2015, nous lançons depuis Venise la « marche des femmes et des hommes aux pieds nus ». Par centaines, nous marcherons sans souliers jusqu’au au cœur de la Mostra Internazionale di Arte Cinematografica, et nous invitons tout le monde à en organiser dans d’autres villes d’Italie ou d’Europe pour réclamer avec force les changements suivant dans les politiques européennes :
 Mise en place de corridors humanitaires sûrs pour les victimes de guerre, catastrophes ou dictatures ;
 Accueil digne et respectueux pour tout les réfugiés ;
 Démantèlement et fermeture de tout lieu de détention de migrants ;
 Création d’un vrai système d’asile unique pour toute l’Europe, au-delà du règlement Dublin.

Pour que l’histoire appartienne aux « femmes et aux hommes aux pieds nus », marchons ensemble.

Andrea Segre (réalisateur italien)

Cette marche aura lieu une semaine après celle qui a vu des milliers de migrants partir à pied de Budapest, en direction de Vienne et de Munich. Des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants, accompagnés de citoyennes solidaires, ont occupé l’autoroute, et marché en direction du nord. Vers l’Europe occidentale. Ils ont forcé l’Autriche et l’Allemagne à leur ouvrir la frontière.

En marchant, migrants et réfugiés brisent des règles qu’ils considèrent illégitimes. Ce convoi rappelle celui, bien plus modeste mais aussi spectaculaire, de la mariée du documentaire « Io sto con la sposa » (« Moi, je suis avec la mariée »). Une jeune palestinienne déguisée en mariée, originaire du camp de Yarmouk en Syrie, a défié l’Europe et le règlement Dublin. Accompagnée de ses invités, elle avait traversé à pied, sur des sentiers de montagne, la frontière franco-italienne. Destination finale : la Suède.

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Image du film documentaire « Moi, je suis avec la mariée » de Gabriele Del Grande, Antonio Augugliaro et Khaled Soliman Al Nassiry.

Dans ce documentaire, les réalisateurs posent une question : de quel côté êtes-vous ? Eux, ils sont du côté de l’ouverture et de la solidarité. Comme les marcheurs hongrois et autrichiens.

La Suisse-UDC, à l’image d’une Europe fermée sur elle-même

Pour mieux apprécier cette solidarité, il faut se rafraîchir un peu la mémoire, et revenir sur ce qui s’est passé ces dix dernières années. En Suisse, ce fut un cauchemar : l’Union démocratique du centre (UDC), un parti d’extrême droite (comme son nom ne l’indique pas), menait la danse par des campagnes d’affichage choc et des initiatives électorales haineuses.

En 2007, une mobilisation anti-UDC

Les sympathisants du collectif Das Schwarze Schaf Le mouton noir ») avaient organisé, en 2007, une « contre-manifestation » lors d’un défilé de l’UDC. C’était en fait une sorte de grande « fête contre le racisme ». Le mouton noir, c’est une référence aux affiches dont l’UDC, a littéralement tapissé les espaces publics suisses. Le parti d’extrême droite avait choisi de représenter des moutons, ces paisibles animaux ancrés dans la culture paysanne européenne. Des moutons blancs en guise de symbole pour les bons citoyens suisses, et des moutons noirs pour...

Grâce à cette campagne d’affichage, la très pacifique Helvétie devint le théâtre d’un violent débat. La « campagne des moutons » avait été initiée afin de récolter des signatures pour une initiative sobrement intitulée « pour le renvoi des étrangers criminels », finalement signée par plus de 200 000 personnes (dépassant largement les 100 000 nécessaires), et acceptée en votation populaire le 28 novembre 2010 par 52,3% des voix.

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Affiche de l’UDC en faveur de l’initiative « Pour le renvoi des étrangers criminels »

Cette campagne, destinée en premier lieu à réunir des signatures, a aussi et surtout permis de donner le ton de la campagne électorale en mettant au premier plan les questions de sécurité et d’immigration.

L’image choquante du mouton noir chassé par des moutons blancs avait été dénoncée par des collectifs (Les Moutons noirs et les Moutons de garde). Ces derniers ont ouvert un site Internet pour lancer le débat sur la façon dont les campagnes politiques sont menées en Suisse. Le succès de leurs « moutons colorés » (l’association a réuni plus de 30 000 signatures en quelques semaines) était le signe d’un rejet massif du discours obscène et haineux de l’UDC par une grande partie de la population résidente en Suisse.

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Carte postale des Moutons de garde

La campagne UDC avait même attiré l’attention de Doudou Diène et Jorge Bustamante, respectivement rapporteurs spéciaux des Nations unies contre le racisme et pour les droits humains des migrants, qui ont écrit au gouvernement suisse pour le sommer de s’exprimer sur cette campagne. Le ministre suisse de l’intérieur avait répondu, comme le rapporte le site Swissinfo, « qu’il revient au peuple de juger ces pratiques, et le cas échéant de les sanctionner au travers des processus démocratiques ».

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Mouton noir

Or, le processus démocratique semble légèrement défaillant en la matière, et la loi 261 bis du Code pénal suisse pas assez efficace si elle n’arrive pas à interdire que de telles affiches soient placardées dans les lieux publics.

À l’étranger, les moutons n’ont pas suscité que des critiques. Le graphisme des moutons bicolores a franchi les frontières et trouvé des adeptes ailleurs. La section du Land Hessen du Nationaldemokratischen Partei Deutschlands (NPD), en Allemagne, ainsi que la Ligue du Nord, en Italie, ont réutilisé l’image du mouton noir. La reproduction des images de l’UDC par des partis d’extrême droite connus pour leur racisme montre bien la position que le premier parti suisse occupe sur l’échiquier politique.

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« Donnons la résidence uniquement aux étrangers honnêtes qui travaillent »
Affiche de la Lega Nord (extrême droite italienne)
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« Le social rime uniquement avec national »
Affiche du NPD (extrême droite allemande)

2011 : campagne « contre l’immigration de masse »

Au moment des élections fédérales de 2011, l’UDC lance une campagne-choc « contre l’immigration de masse ». Cette initiative reçoit suffisamment de signatures pour pouvoir être soumise au vote populaire. Elle sera finalement acceptée le 9 février 2014.

En septembre 2011, l’UDC donne rendez-vous à ses sympathisants sur la place fédérale pour une grande fête. Les images que le parti diffuse sont moins violentes que celles de la campagne de 2007. Les joueurs de corne des Alpes dissimulent la banderole demandant au peuple suisse de « stopper l’immigration massive ». C’est le moment de se réunir dans la bonne humeur, d’écouter des Heimatklänge sons patriotiques »), de lancer des ballons aux couleurs de la Suisse, de manger des cervelas (« la » saucisse nationale) et de montrer l’attachement aux valeurs de la Suisse.

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Les cornes des Alpes cachent le slogan UDC « Stop à l’immigration massive ! »
© Alberto Campi, 2011.

Pas de polémique en 2011, et, à la différence de 2007, la fête, confinée au périmètre de la Place fédérale, sécurisée par des membres du parti, les forces de l’ordre et des services de sécurité privés, se déroule sans incidents ni violence.

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Le dispositif de sécurité mis en place par la police
© Alberto Campi, 2011.

La place, décorée de nombreux symboles nationalistes, s’est transformée en lieu de rencontre et d’échange amical entre joueurs de corne des Alpes, porteurs de cloches, chanteuses et chanteurs de yodel, mais aussi de simples sympathisants, et parmi eux également bon nombre d’étrangers et d’enfants venus des quatre coins de la Suisse et prêts à chanter l’hymne national en déployant le drapeau rouge à croix blanche ou le drapeau vert du parti.

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Joie et bonne humeur
© Alberto Campi, 2011.

Les contre-manifestants se sont réunis à 800 mètres de là, dans un centre culturel alternatif, la Reitschule. Les collectifs Moutons noirs, cette année, ne se sont pas rendus sur la Place fédérale pour empêcher la fête démo-centriste, mais ont organisé une journée de débats, concerts, pièces de théâtre. Dans une petite fabrique dans la cour du centre, ils ont confectionné des T-shirts en y appliquant des images de moutons noirs.

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Production de tee-shirts « moutons noirs » à la Reitschule de Berne
© Alberto Campi, 2011.

Pas de choc frontal, donc : anti-UDC confinés dans la Reitschule, pro-UDC sur la Place fédérale. (Presque) personne n’a franchi la ligne de partage sécurisée par la police. Presque personne, car, comme dans tous les troupeaux, s’échappent parfois quelques brebis. Sur la Place fédérale, un manifestant solitaire a brandi un placard orné du célèbre mouton noir.…

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Le seul manifestant anti-UDC sur la Place fédérale
© Alberto Campi, 2011.

Se taire ou dénoncer ?

Pourtant, en ce samedi ensoleillé, le dispositif policier anti-émeutes était imposant. Tout était prévu pour éviter le scénario de guérilla urbaine d’octobre 2007. Le cortège de l’UDC, bloqué par des contre-manifestants qui avaient érigé des barricades, n’avait pu rejoindre comme prévu la Place fédérale.

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Berne, Place fédérale.
© Alberto Campi, 2011.

Les membres de l’UDC avaient dû se contenter d’un petit tour de pâté de maisons autour de la célèbre fosse aux ours bernoise. C’est à cet endroit, et non pas sur la Place fédérale, que Christoph Blocher (alors chef de l’UDC et conseiller fédéral), avait prononcé son discours et profité de l’occasion pour revenir sur l’incident de 2007, mettant en cause la police bernoise « défaillante », et dénonçant une atteinte à la liberté d’expression.

En 2011, les moutons ne sont plus à l’honneur... L’UDC leur a préféré les grosses chaussures noires. Le message et la stratégie politique restent identiques (immigration et sécurité) pour les élections fédérales du 23 octobre de la même année.

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Affiche UDC pour la récolte de signatures en faveur de l’initiative « Stopper l’immigration massive ! »

L’image rappelle, par le style, la rhétorique et les couleurs, les affiches de la propagande nazie des années 1930. Elle présente des similitudes avec une caricature antisémite parue en 1933 dans le journal autrichien Der Eiserne Besen (Le Balai de Fer) et montrant des juifs qui envahissent la Suisse.

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Caricature antisémite parue en 1933 dans le journal autrichien « Der Eiserne Besen »

Le choix des chaussures noires n’est certainement pas un hasard : elles ressemblent à un symbole très apprécié des adhérents des mouvements néo-nazis, les « combat-style boots », ou encore appelé « rangers ». Les couleurs (noir, blanc, rouge) utilisées pour l’affiche, quant à elles, rappellent tout simplement celles du drapeau de l’Allemagne nazie.

Appuyant une initiative de la section vaudoise de l’UDC, une nouvelle affiche qui ne pourrait être plus explicite a été utilisée : « Tu niques la Suisse ? Tu gicles ! ». Le parti récupère des expressions typiques du « parler jeune », la stratégie étant certainement d’attirer les voix d’une population difficilement mobilisable lors des rendez-vous électoraux.

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« Tu niques la Suisse ? Tu gicles ! »
Affiche de l’UDC-Valais, 2011.

Face à la violence de cette nouvelle campagne UDC, la contre-campagne était bien plus discrète. Le Parti libéral radical s’était alors clairement distancié de la campagne « démo-centriste » : lors d’une conférence de presse, le 10 octobre 2011 à Berne, le porte-parole du PLR avait disqualifié le texte de la nouvelle initiative UDC sur l’immigration. C’est pourtant le Parti libéral qui utilise le même message que l’UDC sur la question migratoire (« Immigration sous contrôle – par amour de la Suisse »), même si les affiches optent pour une forme graphique édulcorée — et probablement moins « efficace ».

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« Immigration sous contrôle – par amour de la Suisse ».
Affiche de la campagne du Parti libéral en gare de Bienne. © Cristina Del Biaggio, 2011.

À l’époque, les anti-UDC étaient divisés sur le fait de dénoncer ou pas publiquement les affiches. La gauche, qui avait vigoureusement réagi à la « campagne des moutons » de 2007 avait changé de stratégie en 2011, ce qui a bien profité à l’UDC. De son côté le parti socialiste avait décidé de faire campagne avec le slogan « Pour tous sans privilèges ». Un slogan rassembleur, mais qui ne dénonçait pas directement la campagne d’affichage UDC...

Le syndicat UNIA, en revanche, avait vigoureusement contre-attaqué. Rita Schiavi, alors membre du comité directeur, pensait nécessaire de dénoncer les messages de l’UDC. UNIA brisait donc le silence des partis traditionnels, à la chasse aux électeurs, en lançant une campagne intitulée « Sans nous, pas de Suisse – Halte à la xénophobie ». Une série de cartes postales et un spot télévisé diffusés sur les chaînes publiques suisses rappellaient ainsi que, sans étrangers, la Suisse ne pourrait simplement pas fonctionner ! Le syndicat passait en revue les secteurs économiques dans lesquels sont employés entre 40 % et 70 % d’étrangers (notamment la recherche, la construction et la santé) pour montrer visuellement la présence, indispensable, de ces « travailleurs sans passeport suisse ».

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« Sans nous, pas... »
Campagne du syndicat UNIA — 2011.

Sur son site Internet, UNIA avait aussi fait référence à une « banderole publicitaire » publiée dans les journaux par l’UDC et qui s’attaquait violemment à la communauté kosovare en Suisse. Le titre (« des Kosovars poignardent des Suisses ») faisait référence à un fait divers survenu en août 2011. Deux jeunes Kosovars avaient agressé deux Suisses, blessant l’un d’eux à la gorge. Et l’UDC d’en déduire : « Voilà les conséquences d’une immigration de masse dont on perd le contrôle. »

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Bandeau de l’UDC publié dans les journaux.

UNIA, s’inspirant du même graphisme, avait aussi produit un bandeau pour rappeler que c’est un Suisse d’origine kosovare, Xherdan Shaqiri, qui a « sauvé » presque à lui seul l’honneur de l’équipe nationale de football, en marquant trois buts contre la Bulgarie lors du match qualificatif pour l’Euro 2012.

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« Contre-bandeau » du syndicat UNIA.

En 2015, « sortir de l’impasse »

Jusqu’à la fin de l’été 2015, dans le cadre de la campagne électorale, l’UDC développe activement son discours contre les réfugiés et son iconographie xénophobe. Une des ses dernières campagnes en date, promues par la section valaisanne du parti, lancée en février 2015, porte sur le voile islamique :

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Campagne lancée par l’UDC-Valais contre le voile islamique

En ce début 2015, l’UDC n’est pas isolé par son discours raciste, au contraire : Urs Schwaller, conseiller aux États du canton de Fribourg pour le parti démocrate-chrétien (PDC), demande ainsi qu’une aide massive au développement permette de transformer l’Érythrée en « pays sûr » (comprendre « pays vers lequel les demandeurs d’asile érythréens peuvent être expulsés »). Pour sa part, le Parti libéral radical demande au Conseil fédéral de réévaluer la situation en Érythrée, pour éventuellement permettre d’y rapatrier les réfugiés politiques…

Les attaques contre les Érythréens se multiplient. Le jeudi 6 août 2015, la ministre Simonetta Sommaruga a enfin décidé de réagir, contrairement au parti socialiste auquel elle appartient, qui reste silencieux sur la question des réfugiés, « sous prétexte que le thème a été imposé par l’UDC » (Le Matin, éditorial du 25 août 2015, PDF) ; Simonetta Sommaruga a déclaré à la presse que « La Suisse ne changera pas sa pratique envers les migrants érythréens, malgré les pressions de partis politiques et de cantons ». Attitude « irresponsable », selon le journal Le Matin...

Mais une initiative anti-UDC voit le jour, RASA, « Raus aus der Sackgasse » en allemand, « Sortons de l’impasse ». Ses promoteurs demandent à ce que les citoyennes suisses revotent sur (et cette fois-ci contre, espèrent-ils) l’initiative de l’UDC votée en 2014.

En guise de conclusion

En 2007, Ueli Maurer (à l’époque président de l’UDC), déclarait à la Télévision suisse romande (TSR) : « Un parti pacifique suisse a été bloqué par la violence, ce sont des faits. La logique qui en découle est simple : il faut voter pour nous. »

En 2015, dans une Europe à un tournant de son histoire qui semble voir émerger un véritable et prometteur « réveil citoyen », l’UDC ne voit qu’un « chaos migratoire », n’entend toujours que des « bruits de bottes », veut fermer les frontières et rendre la Suisse « beaucoup moins attractive » pour les migrants.

Puissent tous les pieds nus et toutes ces marches silencieuses porter l’espoir d’une politique d’asile plus généreuse et plus ouverte en Europe. Puissent leurs pas être plus puissants que nos politiciens, qui ont préféré la la fermeture et la haine à l’humanisme et la solidarité.

Quelques liens :

 Campagne contre l’initiative « renvoi des étrangers criminels » (votation du 28 novembre 2008), assez brutale, mais les trois petits films sont très bien faits.

 Campagne UDC pour les élections d’octobre 2011 : « Les Suissesses votent UDC ».

 Contre-spot anti-UDC : « Toutes les Suissesses ne votent pas pour un parti xénophobe ».

 Campagne du syndicat UNIA : « Sans nous pas de Suisse ».

 Entretien avec Alexander Segert, le publicitaire de l’UDC, 24 Heures (Lausanne), 29 novembre 2010.

 Détournement des affiches de l’UDC (en allemand).

 Un siècle d’affiches politiques « musclées » en Suisse.

 Le discours de Dick Marty, ancien président et membre de la Commission des droits de l’homme au Conseil de l’Europe. Extrait : « Les progrès dans le domaine des droits humains sont cependant précaires et les régressions nombreuses. Certes, le sujet est dans la bouche de tout le monde, dans les discours de la plupart des politiciens. Pourtant, comment ne pas voir qu’au cours de cette dernière décennie nous avons fait d’inquiétants pas en arrière ? Comment ne pas ressentir un malaise, comme un présage que quelque chose de grave et de dangereux pourrait se répéter ? »

 Polémique autour de Vol spécial, le film de Fernand Melgar sur un centre de rétention suisse, qui suscite l’ire de l’UDC : « “Vol spécial” est autorisé à l’école, au grand dam de l’UDC », Le Courrier (Genève), 12 octobre 2011.

 Mieux connaître l’UDC : un parti qui ratisse très large, une interview de Cécile Péchu et Phillipe Gottraux dans le Courrier, 17 octobre 2011.