Noël à Bethléem, au pied du mur

#Murs #Frontières #Palestine #Israël #occupation #Bethléem

24 décembre 2014

 

par Elisabeth Vallet

Professeure associée au département de Géographie de l’UQAM
et directrice de recherche à la Chaire Raoul-Dandurand.

Les murs frontaliers ne cessent de se multiplier comme le montre cette petite infographie et cette grande carte, réalisées en collaboration avec Courrier international.

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Les murs frontaliers de plus en plus nombreux.

 

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Des frontières et des murs
Carte élaborée par Élisabeth Vallet en 2014 et publiée par Courrier international.

Mais il en est un qui, chaque année à Noël, prend une dimension particulièrement symbolique : le mur en Palestine.

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Bethlehem Christmas Defies Israel.
Palestine Chronicle, 23 décembre 2008

Tellement symbolique d’ailleurs, qu’il en est devenu l’emblème d’une conférence chrétienne annuelle organisée à Bethléem et promue par l’International Christian Embassy Jerusalem :

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Christ at the checkpoint.

Guy Delisle, dans ses superbes Chroniques de Jérusalem avait d’ailleurs bien résumé l’idée :

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L’église derrière le mur.
Chroniques de Jérusalem, Guy Delisle, novembre 2011.

L’art, et particulièrement l’art graphique, a fait son chemin sur les murs, au point de faire désormais l’objet d’articles scientifiques et d’ateliers.

Dans le cadre du festival Bethlehem Unwrapped, un mur de 8 mètres de haut a ainsi été construit en janvier 2014, face à l’Église St James, à Piccadilly à Londres.

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Mur de nuit à Piccadilly.
Source : festival Bethlehem Unwrapped.

À Bethléem, c’est Noël qui alimente la production artistique sur le thème du mur, comme les fresques et graffitis ou les crêches vivantes :

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Merry Christmas from Bethlehem ghetto.
Source : Come ye to Bethlehem – and behold the ‘little town’ circa 2013, Crosslight
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Crèche vivante devant le mur de Bethléem.
Source : Salam Akwaba, décembre 2010

En 2012, Banksy, l’auteur des mémorables fresques peintes en 2005 et 2007 sur les murs de Bethléem, a créé cette carte postale qui fait, tous les ans, le tour des réseaux sociaux lors des fêtes des fin d’année, et qui donne une représentation d’un Bethléem très contemporain :

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Joseph and Mary can’t make it to Bethlehem.
Source : Banksy.

Cette image a d’ailleurs été reprise de manière assez ironique aux États-Unis dans le cadre d’une campagne d’affichage menée par l’ONG « If Americans Knew » :

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Oh little town of Bethlehem
L’image de Banksy reprise pour une campagne de l’ONG américaine If Americanw knew.

Et c’est peut-être grâce à Banksy que le mur appartient désormais à la « mythologie subversive de la Nativité ».

Les petites crèches traditionnelles construites en bois intègrent désormais le mur, comme celles réalisées en bois d’olivier par la famille Anastas et par un artiste palestinien de Beit Sahour

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Crèche en bois créée par Claire Anastas
Anastas family - Holy star gifts souvenirs.
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Separation Wall Nativity
Beyond Bethlehem’s Wall.

Depuis, les caricaturistes ont largement repris la thématique comme Lalo Alacaraz ou Khalil Bendib.

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Welcome to Bethlehem.
Khalil Bendib, 2009.
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Joseph et Marie devant le grillage.
Lalo Alacaraz, 2007.

Dans ce domaine, le travail du dessinateur britannique Polyp est unique :

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Les Rois Mages devant le mur.
Polyp, Year unknown.
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Joseph et Marie passent le checkpoint.
Polyp, Year unknown.

D’autres cartoonistes utilisent la force du mur lui-même pour rendre compte de sa réalité. La scène est plus spectaculaire, « dramatisée » dans le sens propre du terme :

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Oh little town of Bethlehem... A Palestinian Christmas card
Source : The war poetry website.

Ce qui est sans doute le plus dérangeant, c’est que le mur appartient maintenant à l’univers des cartes de vœux. Même si cela reste ironique, il s’inscrit progressivement et inexorablement dans l’imagerie populaire. Si l’ironie s’efface pour laisser la place à l’art, cela correspond implicitement à une certaine forme d’acceptation.

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Les Rois mages sous une nuit étoilée.
Source : The People’s Table… Marcus Curnow.
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La carte postale.
Source : Les Australiens pour la Palestine.
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Carte de vœux.
Source : Coalition for Justice and Peace in Palestine.

Mais si on doit en rire, il reste la version païenne. Moins triste, et tout aussi réelle :

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Le Père Noël à l’entrée de Bethléem.
Source : Coalition for Justice and Peace in Palestine.
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This thing was not mentioned on the map.

Le mot de la fin, ce sera le mur lui-même qui le donnera...

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Parce que les murs finissent toujours par tomber.